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  • Marianne Abramovici

Pourquoi encore écrire un mémoire !



Ecrire un mémoire ? Non mais sérieux ? En 2019 ?


Problématiser ? Qui, d'abord, peut me dire ce qu'est une problématique ? Qui ! Tu mets deux prof dans la même salle, ils ont pas la même définition.

Si, si, mec, nous on a eu le sketch. Y' en a un qui voulait absolument que ce soit une question et l'autre qui se moquait bien de la forme qui qui insistait pour que cela formule "un phénomène qui pose problème".

Donc j’te résume parce que je crois que je t’ai largué (t’inquiètes, c’est normal, cela nous fait cela à tous). Une problématique, c'est la formulation d'un problème dont tu ne connais pas la réponse. Tu piges ?

Et là, tu l’as vois, l’arnaque? Les profs, ils te poussent à te poser une question dont tu n’connais pas la réponse, dont ils ne connaissent pas non plus la réponse. Mais après, ils te disent, surtout, commencez par faire votre plan détaillé. Tu fais quoi, toi, comme plan détaillé, quand tu as aucune idée de la réponse à la question que tu as posé ?

Pourquoi perdre plusieurs jours voire semaines à lire des auteurs qu'on ne rencontrera jamais dans sa vie professionnelle ?

Tu sais que parfois, la « référence » est morte ? J’en ai pas encore vu un seul qui a sa chaîne You Tube ! Et quand ils tiennent un blog, t’es content. D’abord, tu piges un peu mieux que dans leurs articles. Et puis ensuite, tu peux raconter quelque chose sur l’internet des années 2000 !

Non mais tu comprends, une chaîne You Tube, un podcast, même, ce serait pas du superflu. Parce qu’ils écrivent dans un jargon, mais un jargon. C'est simple, y'a un auteur. J'ai du relire chacune des phrases de son article pour les comprendre. Et pas un résumé pour les nuls sur la toile. Tu lis ou tu crèves. Et si encore c'était nul, ce qu'il racontait ou bien si t'avais une page wiki que tu pouvais pomper tranquillement ? Mais non. C’est « rare », aride mais c’est puissant, mec, c'est intelligent, drôlement subtil et t'en chie pour le comprendre mais p…., c’est que cela vaut la peine ! T’en ferai presqu’une version rap pour populariser tellement.

Mais surtout, pourquoi on te demande d'écrire. C'est qu'ils insistent beaucoup là-dessus, les barbacoles, faut que ton travail soit ORIGINAL. Et patati sur le droit intellectuel, et patata sur le plagiat. Rien à faire, tu dois écrire toi-même. Merci pour tous les dys. T'as le droit de te faire relire. T'as le droit de te faire aider dans la forme mais pour le fond, cela doit sortir de tes méninges. Et depuis quand on m'a appris à avoir une pensée originale ?

Parce que l'école, c'est pas seulement apprendre et savoir quand citer les deux trois auteurs qu'on a vaguement retenu ?

Donc, avant de sortir avec un grade de maître, tu dois montrer que tu es capable d'avoir une pensée originale, dont tu es le seul responsable. Comme si, demain, tu te retrouvais à devoir inventer une nouvelle théorie, une nouvelle lecture du monde afin de donner du sens à une société et un monde qui évoluent à une telle vitesse que tes profs, ils ne suivent plus ! Voilà qu'on te forme à être autonome à résoudre leur problème. Ils ont trop joué à zombie survivor, c'est pas possible !

Et puis, attends, il ne s’agit pas seulement de lire, hein, il faut "sourcer" toutes les informations présentes dans notre mémoire ? Quand je dis, "toutes", c'est "TOUTES". Le moindre chiffre, la moindre infographie, la moindre citation.

Suffit pas d'indiquer "Le Parisien" ou "Mon oncle" affirme que, non, il faut trouver "la source originale" de l'information. Comme si je la connaissais moi ! Je ne sais pas si tu réalises le boulot que cela demande. Il faut faire un vrai travail de fourmi. Parce que toi, tu crois naïvement que si c'est quelqu'un à la télé qui a dit une information, c'est forcément vrai. Et ben non. Par exemple, on va te faire remarquer que le chiffre date d'il y a dix ans ou bien encore que l'étude que tu comptais utiliser pour prouver le truc auquel tu crois dur comme fer, ben, c'est un truc financée par un lobby et que du coup, c'est pas vraiment de l'information. Bref, faut que tu consultes pleins d'avis différents et c'est dangereux, ce truc. Parfois, même toi, tu sais plus quoi croire. Ce truc, c'est un truc à te faire changer d'avis !

Cerise sur le gâteau, va falloir que tout cela soit "propre", de A à Z. Un titre (important le titre) un sommaire (le retour du p...de plan), une introduction qui annonce le plan (je te dis, ils ont vraiment un problème avec cela), une introduction de première partie (si, si, ils sont névrosés ou alors ils ont tous Alzheimer), une transition, une deuxième partie (introduite et conclue, des malades, je te dis) et enfin une conclusion où tu dois, c'est le pompon :

Résumer les étapes précédentes (l'exposition de tes idées)

Répondre à la problématique (une mémoire de poisson rouge mais de la suite dans les idées)

Et, tiens toi bien, moi, cela m'a fait hurler de rire, "ouvrir". Genre, peut être que tu feras un tome deux !

Et si tu crois qu'une fois que tu as respecté toutes les consignes, le truc intro / transition / conclusion. Si tu penses que quand tu as lu et pris des extraits en les indiquant bien entre guillemets (je savais même pas ce que cela voulait dire ce truc). Si tu es content, parce que tu as réussi à faire le sommaire ...et ben t'as tout faux si tu penses qu'ils vont être contents. Ce sont des fous obsessionnels.

T'as cité un livre ? Ils veulent, l'année de l'édition et la page.

T'as repris une figure, ils veulent le titre, la légende et la source.

T'as employé un acronyme (un autre mot que j'ai appris), tu dois indiquer sa signification en notes de bas de page (tu savais, toi, qu'on pouvait créer des notes de bas de page sur word ?).

C'est bien simple. Y'a toujours un truc qui va pas, TOUJOURS. Des professionnels du stylo rouge, tes profs !

Quand c'est pas l'orthographe, c'est les titres (signifiants, les titres). Quand c'est pas les figures (numérotées, hein les figures), c'est la bibliographie qui ne respecte pas les conventions, qui n'est pas correctement classée.

Toi, tu t'es dit que si tu travaillais un jour par semaine pendant deux mois, tu t'en sortirais pour les 50 pages et voilà que, tu mets dix jours rien que pour corriger toutes les remarques du prof. Et quand tu lui rends ta seconde version, il a encore pleins de remarques. Et quand la troisième fois, tu vois plein de rouge, tu te dis que, là, c'est mort, ton mémoire, tu le soutiendras jamais, il te dit : "non, vous allez soutenir, mais attention à vos transparents de présentation".

Et quand finalement après trois nuits blanches à te répéter le truc en boucle, trois journées à parler devant ton miroir, même que tu loupes le dernier épisode de El casa del Pape parce que tu recommences trois fois. Putain, après avoir vécu juste un enfer, tu penses détester ce travail et que le prochain barbecue, tu vois très bien avec quoi tu vas l'allumer. Et puis la soutenance Et puis les questions Et puis la note, la validation, le Master. Et puis ton directeur qui te dit en souriant : "Ben vous voyez, c'était pas si dur !"



Epilogue (à ne lire qu’après la soutenance, chiche ?)

Et tu sais quoi, ben tu l'envoie pas chier. Parce que tu te souviens de tous les mails auxquels il t'a répondu. Tu le revois, son regard, quand tu posais une question à laquelle visiblement, il venait de répondre. Tu te souviens, de sa main sur l'épaule quant à la deuxième version, tu avais un coup de mou.

Et puis en fait, c'est vrai. C'était pas si dur. Ou plutôt si mais tu ne t'en es pas si mal sorti. Et en fait, ce truc, c'est vraiment le premier dont tu es vraiment fier parce que tu peux le défendre de la première à la dernière ligne. Et tu te surprends à sourire quand tu te souviens que tu as su argumenter face à ce prof que tu n'avais jamais rencontré, et même qu'il n'a pas eu le dernier mot. Un prof qui n'a pas le dernier mot, whaou, c'était donc possible ?


Voilà, y'a un petit mémoire de rien du tout où y'aura ton nom dessus à la bibliothèque. Et ça, finalement, peut être que cela méritait tout cela.


Le barbecue attendra.

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