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  • Marianne Abramovici

Et, si, pour réussir ces entretiens dynamiques, on adoptait la stratégie du chaton ?


Durant ma thèse à la SNCF, je dois mener des entretiens avec des « opérateurs de sécurité » pour mieux appréhender leur culture professionnelle. Mon guide d’entretien est complexe, intégrant du semi-directif et une approche issue de la psychologie sociale. Surtout, je vais les mener, indépendamment de ma volonté, de façon dynamique.


Retour sur le contexte, on est entre les deux plus grandes grèves qu’a connues la SNCF. La question du management de la sécurité ferroviaire est au cœur des débats très violents qui opposent la « base » et les responsables de l’entreprise.

et je vais vite me rendre compte que les réactions « spontanées » à l’énoncé de certaines questions sont beaucoup plus « riches » sur la culture sécurité des cheminots que les-dites réponses. Mais je m’écarte de mon sujet. Il se trouve que si j’ai bien déterminé et mon guide d’entretien, et ma base d’entretien (qui je dois voir), je ne pense pas à déterminer le « quand » et le « où ». Ces deux variables qui peuvent sembler indépendantes sont donc traitées par les responsables des deux postes de travail que je dois aller voir. Or, ces deux responsables vont prendre des décisions diamétralement opposées, ce qui va me permettre de découvrir la « force » de ces caractéristiques :


- Dans le premier poste, les agents sont « convoqués » et doivent se déplacer dans la salle de réunion, lieu éloigné du poste et qui ne sert qu’aux réunions d’équipes, lieu impersonnel et associé à la hiérarchie


- Dans le second poste, un agent de réserve est « mis à disposition » du poste durant toute la période afin que les agents en poste puissent, au moment où ils le souhaitent, s’entretenir avec moi dans une petit salle qui jouxte le poste, salle de café, de réunions informelles et vestiaires.


Serez vous surpris si je vous dis que les entretiens du second poste ont été plus nombreux et beaucoup plus « riches » que les entretiens du premier poste ? Pourtant je remercie l’agent du 1er poste qui est venu et qui, avant même de s’asseoir en face de moi, à fait le tour de la salle en commentant pour moi les affiches, toutes, des affiches mettant en avant les « performances » en matière de régularité et qui commença l’entretien comme cela « Vous êtes ici pour comprendre notre culture de sécurité ? Vraiment ? Ici ? Ben, regardez, c’est notre salle de réunion ? Vous en voyez vous, des indicateurs de sécurité ? La sécurité, on en parle, on en parle mais ce qu’eux (la direction) veulent, c’est de la régularité ».


Ce que je veux souligner à travers cette histoire, c’est qu’un lieu de rendez vous n’est pas neutre et « dira » quelque chose de ma « position » vis-à-vis des agents que je vais interroger. Suis-je du côté de la direction, qui a convoquée les agents dans « leur » espace ?


Suis je de leur côté, qui vais vivre à leur rythme dans leur espace et qui suis à leur disposition ?


Quand le responsable du pôle sécurité me fait visiter pour la première fois le poste que je vais étudier dans le cadre d’une visite de sécurité, il me « situe » volontairement ou involontairement, parmi ceux qui « contrôle ».


L’entretien commence avant la toute première parole échangée. Il commence lors de la prise de rendez vous. Il commence par le lieu où il se déroule. Il commence par la tenue portée, par la façon dont on est introduit.


Pourquoi ?


Parce que toute relation humaine cherche à comprendre, à faire sens à une situation. La personne que vous allez interroger cherche à comprendre qui vous êtes, d’où vous êtes pour comprendre ce que vous voulez savoir et s’y conformer. Pour « bien faire », elle va chercher dans la communication non verbale, dans les signes comme le lieux ou bien l’heure des indices de « qui » vous êtes et pourquoi vous venez.


C’est pourquoi il faut toujours s’annoncer, toujours expliquer pourquoi on fait un entretien. C’est la raison pour laquelle aussi le statut « d’étudiant », de « stagiaire » (le mien à la SNCF !) est un « bon » statut car il vous place comme un « bleu », un p’tit gars qui ne sait pas et qu’il faut « mettre au parfum ». Bien meilleur statut que celui de « balance » ou de « œil de Moscou »….




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